Au lieu de vous taper la prose indigeste du mec qui a un nom de Lego (et qui nous l'inflige en spam) LISEZ FP Mény qui vient de crever dans le silence d'une grange.
Y en a qui font pas leur taf...d'autres oui.
FP Mény était SDF, et ne s’en plaignait pas, l’avait voulu. Suivant les jours il gambadait à travers champs, plages et forêts, glissait à vélo sur les petits chemins qui rejoignent les villages aux villes, ou traînait sa carcasse et sa gueule de bois dans les bibliothèques et les cinés de province. Libre. Pauvre. Comme beaucoup de ses pairs, souvent désabusé, amer. Critique – on l’est forcément quand on a opté pour la marge et qu’on s’y tient comme à une promesse. Drôle aussi, c’est plus rare.
«Ils invoquent Rimbaud et chassent les vagabonds. Pourquoi faut-il que j’ai toujours l’air de passer par hasard, pas invité ça c’est sûr, à Querbes par exemple le jour d’un minuscule festival littéraire dans un hameau tout paumé il me regarde et me demande si je viens par hasard, ah bon, dis-je, je croyais qu’il y avait un festival littéraire, que veux-tu j’ai pas l’air, même si j’atterrissais en hélicoptère dans leur évier, ils croiraient que c’est par hasard [...]».
FP Mény écrivait, et c’est comme ça que j’ai su qu’il existait, en lisant sur le net un texte de lui à l’été 2007, un texte rageur exaspéré des complaisances geignardes de tout un chacun. Il annonçait la sortie pour bientôt d’un bouquin j’avais laissé un post pour lui dire de m’avertir de sa parution. Conquête du désastre a paru en avril 2008. Isabelle Dubois, l’attachée de presse de son éditeur, me l’a envoyé en espérant que j’en dirais un mot quelque part.
«On écrit parce que ça se voit pas pour lutter contre tout ce qui se voit.»
Mais que dire de Conquête du désastre quand on est écrivain, pas critique ? Qu’il m’a d’abord rappelé – jeux de mots, apocopes, enchâssements, délirants aphorismes – Tarentula, de Bob Dylan? Mais qui a lu Tarentula ? Que plus j’avançais dans sa lecture, plus j’entendais l’écho beatnick de Kerouac, Ginsberg, et Leary ? Que ça m’a donné envie de les relire ?
«Le pissenlit devient grand, l’homme petit... Yo ! Haïku de celui qu’a traîné dans les montagnes avec son chiot. L’instinct devint grand... À travers les grands canyons ils firent une équipe redoutée. Un jour, hombre, il ramassa un vieux magazine défraîchi... Elle... qui leur rendait hommage. Hors du monde ils ne goûtèrent que peu cette gloire fugace.»
Quoi d’autre ? Que plus je laissais ses lignes m’apprivoiser, plus je les laissais m’amuser, m’agacer, me surprendre et me suspendre, plus j’avais envie de rencontrer FP Mény. Ça ne se fera pas. Hier 12 juin 2008, Isabelle Dubois m’a annoncé qu’on venait de retrouver son corps dans la grange d’un village de Corrèze où il s’était réfugié pour se protéger du mauvais temps. Reste ce curieux bouquin, morceaux « captés » à son enfance un peu et à quinze années d’errance. Frédéric avait 43 ans. Il ne goûta que peu cette gloire fugace. (Serge Rivron)
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