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17.3.07

DE L'ART TOTAL A L'ART GLOBAL

Si « art total », de la fantasmagorie wagnérienne au fantasmatique et impudent « tout est art », rimait avec totalitarisme, l’art global le glob’art— est désormais celui de la démocratie post-totalitaire planétaire et de ce nouvel oxymore qu’est la révolution conservatrice.

L’art global n’est pas tant un art intégral qu’un art intégralement intégré, ayant abandonné —après l’échec de ce qu’il pouvait encore y avoir de velléité critique dans le post-modernisme— toute dimension critique, s’appliquant sans relâche à faire passer toute visée critique pour réactive.

Tout au plus, quitte à se confiner dans un rôle d’animation socioculturelle, d’entertainment, et à se diluer dans l’industrie culturelle, l’art global, comme avant lui l’art total, aimerait-il pouvoir illusoirement réenchanter un monde désenchanté, un monde que l’actuelle globalisation —dont il est pourtant partie constituante— désenchante toujours davantage. C’est, après les grands défilés hystériques des régimes totalitaires, l’art des défilés des collections de mode sur des bandes-son mixées par des DJ déjantés ou qui feignent de l’être. L’art global tend à se confondre avec le look. Là où l’art total entendait faire fusionner l’art et la vie, l’art global est l’art de la confusion généralisée.

L’art global est un art destiné non tant à un public qu’à la fois au marché, en voie de mondialisation, et aux institutions, tant nationales qu’internationales. C’est l’art le plus institutionnel qui soit, l’art hyper institutionnel qui a délaissé toute critique des institutions comme de l’art en tant que tel. L’art des grandes messes et kermesses, des grandes foires et foirades internationales de l’art.

La globalisation de l’art, c’est, pour la première fois, la mondialisation effective du « monde de l’art », son extension, sinon à toutes les couches de la société, du moins à la planète entière. Là où l’art total, en quête de synthèse des arts, passait outre les frontières entre les arts, l’art global se joue des frontières géopolitiques sans pour autant toutefois pouvoir les ignorer tout à fait, concentré qu’il demeure dans quelques places fortes surprotégées. Hauts Lieux de l’art global dans lesquels se retrouvent périodiquement les acteurs du monde de l’art global qui, avec un bel ensemble, ne cessent de se transporter de l’un à l’autre, telle une volée d’oiseaux migrateurs piailleurs. De manière générale flux, tant matériels que virtuels, à la fois d’œuvres, de capitaux et de personnes. Mutation du monde de l’art en réseau de l’art, à la fois réseau marchand et réseau institutionnel, connectés entre eux.

Ainsi l’artiste global est-il celui qui, inversant la filière traditionnelle, se fait d’abord reconnaître mondialement avant de se faire reconnaître à l’échelon local. C’est l’artiste mobile, le jet-artist ne résidant le plus souvent pas dans le pays dont il est originaire, si tant est qu’il réside quelque part puisque lui-même doit arpenter sans relâche la planète de part en part. De même que le commissaire de l’art global est celui qui poursuit une carrière internationale le conduisant à occuper successivement des postes dans différents pays et à être en perpétuel déplacement dans un monde lui-même toujours en mouvement. Cependant que l’artiste global est l’artiste qui joue au commissaire et le commissaire global le commissaire qui joue à l’artiste.

Alors que l’art total était l’art qui puisait dans tous les media à la fois, le numérique est devenu la novalangue de l’artiste global. En même temps que l’artiste global est celui qui puise — et qui pille— dans toutes les cultures à la fois, qui puise dans l’hypermarché des cultures du monde, de la world culture. L’art global est celui du mix planétaire, dans l’occultation des rapports de force historiques dans lesquels se sont constituées ces cultures.

Cependant, alors qu’un art du fragment avait pu historiquement être opposé avec une certaine efficacité à l’art total, la prise en considération de la dimension locale, en dépit de tous les espoirs qui ont pu s’y reporter, s’est montrée incapable de s’opposer valablement à la dimension globale ou même d’y résister. Le local se trouve lui-même globalisé, « glocalisé ». La globalisation est à la fois délocalisation et relocalisation, sécrétion de nouvelles différences et de nouvelles inégalités locales. La montée des identarismes, en art comme ailleurs, loin de s’opposer à la globalisation, n’a fait qu’y participer.

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